Pierres de couleur
L’atelier de Manuel Soirat, Meilleur Ouvrier de France en 2007, est comme hors du temps. Les meules sont actionnées à la main, le matériel qu’il utilise est entretenu avec beaucoup d’attention et de soin tant il est devenu introuvable. Son savoir-faire est étroitement lié à la maîtrise de ces outils traditionnels et à la précision qu’ils offrent. Manuel Soirat est lapidaire spécialisé dans les pierres de couleur. Il est aussi l’un des rares artisans français à approcher les pierres de centre de la haute joaillerie. Son métier, tel qu’il le définit, est de révéler tout le potentiel d’une pierre par la taille et le facettage, d’en exploiter ou d’en atténuer les imperfections. Son savoir-faire allie une extrême précision et beaucoup d’intuition, une intuition que seule l’expérience permet d’acquérir.
« Deux pierres de même couleur, qui paraissent identiques mais proviennent de mines différentes, n’auront pas le même potentiel, explique le Maître d’art. Avant de
travailler une pierre, il faut l’étudier attentivement. L’expérience permet d’en percevoir les possibilités. Il faut comprendre la matière et anticiper le résultat. »
Le savoir-faire de Manuel Soirat ne peut s’exprimer que dans la confiance et la compréhension d’un geste destiné à transformer une belle pierre en une pierre parfaite, malgré la suppression de matière. Les commanditaires doivent se fier à son oeil et à ses décisions.
« Les pierres sont souvent complexes et, de par leur valeur, elles ne pourront jamais supporter une mécanisation de leur taille, précise Manuel Soirat. L’esprit et la main doivent travailler de concert. Une nuance de couleur, quelques centièmes de carats conservés, un défaut atténué et c’est une réussite. »
La transmission du savoir-faire est aujourd’hui sujette à un paradoxe. L’apprentissage de la technique est empirique et doit s’effectuer directement sur la matière, une matière qui n’appartient pas à l’artisan mais aux commanditaires. Or, ces derniers n’acceptent de confier leurs plus belles pierres qu’à une poignée de professionnels. De plus, l’apprentissage prend du temps, il nécessite beaucoup de concentration et génère un certain stress, c’est pourquoi l’abandon est fréquent.
Manuel
Paris