Au premier regard, les parures d’Emilie Moutard-Martin ont en commun une recherche où la séduction visuelle repose sur une volonté de simplicité. Dans sa façon de mettre en œuvre aussi bien certaines plumes rares que les plumes plus répandues, il y a d’abord la fascination qui la conduit à exalter la beauté discrète du matériau, à lui donner un rôle à sa mesure sans ostentation. Façonner les plumes pour en révéler leurs particularités, mettre en valeur leur texture, souligner leurs couleurs, les détourner pour créer une illusion visuelle, telle est l’approche qu’elle se propose d’explorer. De même pour la forme et le dessin : l’astuce ou la complexité de certaines courbes disparaît finalement dans l’effet qu’elles produisent.
Puisque ces parures sont un signe adressé à l’autre, les porter, c’est murmurer à la foule qu’on aime la courbe d’une aile d’oiseau ou l’ordre étrange des orchidées. Mais si ces pièces distinguent à notre regard celles qui les portent, elles sont aussi créées pour toucher à l’intimité. Elles se portent sur le corps, contre l’épaule, près du visage, autour du cou, du poignet. Elles enlacent les corps de leur chuchotement. Et comme certaines paroles tendres ne se disent et ne s’entendent que de très près, ces parures recèlent d’infimes détails qui évoquent des mots, des histoires, des émotions personnelles dont la découverte se fait peu à peu, à la manière dont nos yeux s’accoutument au « doux frou-frou » des étoiles.
Plumes, paillettes, perles, fils et autres merveilles sont l’alphabet de ces messages intuitifs. Ils composent les secrets dont les titres se font l’écho. Comme le mot lui-même, l’ouvrage d’Emilie Moutard-Martin est à la fois savoir-faire de la main, et recueil d’idées à lire. Les lignes de ses créations ont leurs pleins et leurs déliés, et les broderies ou les paillettes minuscules obéissent au retour rythmé des rimes. Ces ouvrages sont des poèmes visuels. Ainsi peut-on se laisser aller au plaisir de s’apercevoir que chacun d’entre eux a fait de son secret une évidence pour l’œil.